Prix Sorcières - Lauréats 2009

 

Affiche prix sorcières 2009Illustration Mathis


TOUT PETITS

Raymond rêveRaymond rêve
Anne Crauzaz
Ed. Mémo - 14,00 €

Raymond est le frère aîné d’une grande famille : né des amours de Germain et Lucette, il a des dizaines de frères qui bientôt envahissent la page. Raymond est un escargot. Et sous nos yeux ses rêves prennent forme : il devient bientôt limace, serpent sonné, dragon, pieuvre, pomme chatouilleuse ou amoureuse, extraterrestre, fraise ou même éléphant !

Ses jolies courbes si simples se prêtent avec humour à toutes ces transformations. Car il suffit d’un changement de couleur, d’un déplacement léger du trait ou d’un vide opportun pour accomplir le jeu de travestissement. Raymond est toujours là, ni tout à fait le même, jamais vraiment un autre. L’idée de l’album est simplissime, sa mise en application parfaite. Réalisé avec finesse, précision, tendresse – jusqu’au papier qui appelle la caresse – ce petit livre des métamorphoses est un vrai régal pour l’imagination, à partager sans réserves avec les tout-petits.

 

ALBUMS

L'été de GarmannL'été de Garmann
Stian Hole
Ed. Albin Michel - 12,50 €

« C’est la fin de l’été, les trois vieilles tantes arrivent comme chaque année avec leur arthrose et leur gâteau meringué. Demain Garmann va entrer au CP. Il a peur. Mais il fait cette découverte incroyable : les adultes aussi ont peur ! ».
Cet album extraordinaire aborde avec poésie, humour et tendresse, quelques grandes questions de la vie. Il a besoin de temps pour apprivoiser son lecteur, mais après avoir été dérouté par les illustrations, on aime finalement très vite son univers hors du commun. Le livre refermé, les mots et les images tournent dans la tête… Garmann et sa famille se logent dans le coeur, tout doucement, durablement, avec beaucoup, beaucoup d’amour ! Car c’est avant tout de cela qu’il s’agit : d’un amour immense et simple dans une jolie famille, en ces derniers jours de l’été, avant que le temps reprenne sa course folle… Cet été devient le nôtre, au milieu du chant des grillons que l’on croit entendre. Enfance, amour, peur, culpabilité de ne pas être assez présent pour ses enfants, inquiétude de les laisser grandir, aspirations personnelles, douceur de l’été, vie, mort, temps qui passe, liens intergénérationnels, différences générationnelles, fleurs, bonnets tricotés qui grattent, dents de lait, complicité entre mère et fils…TOUT est dans cet album drôle, original, profond, mélancolique et rempli de questionnements et surtout d’amour !
« Tante Iseline a de nombreuses rides et de longs poils blancs sur le menton. Garmann se dit que les rides ressemblent aux cernes des troncs d’arbres. Du bout de l’index, il suit sur la peau blanche et fine de tante Iseline une veine qui lui court le long du dos de la main. Les aveugles lisent avec les doigts, songe Garmann. Il ferme les yeux. La peau lui fait l’effet d’une feuille de papier très fin. Tante Iseline se réveille en sursaut et remet son dentier en place. « Tu as été enfant, un jour ? » lui demande Garmann. Elle réfléchit longuement. Une libellule suspend son vol. Tante Iseline sourit. Elle dit : « Oui, il y a cent cinquante ans … » Puis elle pouffe et son rire secoue sa poitrine. » Magnifique.

 

ROMANS 9-12 ANS                           

L'arche part à 8 heuresL'arche part à 8 heures
Ulrich Hub (auteur)
Jorg Muhle (illustrateur)
Traduction : Emmanuèle Sandron
Ed. Alice - 8,00 €

Trois pingouins s’ennuient sur la banquise. Pour passer le temps, ils se chamaillent pour tout et n’importe quoi. Une colombe vient rompre leur ennui : elle leur annonce que Dieu a décidé de noyer la terre et ses habitants et qu’il a chargé Noé de mettre à l’abri, dans l’arche, une paire de chaque espèce animale. Mais attention, pour échapper à une mort certaine, il leur faut être à l’heure. L’arche part à 8 heures précises ! Seulement, les pingouins sont trois et bien décidés à sauver leur peau et donc à rejoindre l’arche avec, en fraude, un pingouin caché dans une valise. Même si, ce faisant, ils oublient que s’ils sentent tant le poisson, c’est qu’ils savent nager et pourraient donc très bien survivre au déluge en restant dans l’eau… Comme ce détail ne leur reviendra qu’après quarante jours, ils expérimenteront le voyage en arche, ses plaisirs : c’est surtout une forme de distraction, ses désagréments : promiscuité, repas légers, interdiction de jouer aux cartes et de chanter et puis surtout, il leur faudra garder secrète la présence du troisième représentant de l’espèce… Dès les premières lignes –les premiers dialogues – on se dit que ces trois énergumènes feraient sur scène un agréable spectacle.
Et à y regarder de plus près, c’est bien logique, puisque ce texte – ici
présenté sous la forme d’un petit roman – est à l’origine une pièce radiophonique.
Dialogues savoureux et parfois franchement drôles, bruitages nombreux (cris d’animaux en tous genres et de tous poils, bruits d’orage et de pluie), décor simple (la banquise, la cale de l’arche), ce texte se prête sans doute avec bonheur à une adaptation théâtrale, comme la forme de cette édition se prête à une plaisante et amusante lecture. On rit beaucoup, mais on se pose aussi d’importantes questions sur l’existence de Dieu sans jamais se prendre au sérieux.

 

ADOS

Le dernier orcLe Dernier orc
Silvana de Mari
Traduction : Jacques Barberi Wiz
Ed. Albin Michel Jeunesse - 19,00 €

Continuation du très beau Dernier Elfe de la même auteure, ce récit au souffle épique indéniable nous replonge dans le monde des Terres Connues, situé quelque part à un certain moment, comme tous les grands univers d’épopée fantastique. Yorsh, le dernier Elfe, Robi-Rosalba, son épouse, Erbrow, leur fille la demi-elfe, Rankstrail le plus grand des chefs de guerre qu'ait connu l'humanité, issu de la fange des cités, Aurora, la princesse courageuse et pure, les orcs, créatures sanguinaires menaçant le monde des hommes… Ce roman foisonne de personnages profondément humains du plus innocent au plus abject et ce n’est pas le moindre de ses mérites. La guerre, les pouvoirs magiques, l’amour, la trahison, la violence, le sacrifice, la haine, tous les éléments des chefs d’oeuvre de la fantasy sont réunis. Portée par une écriture aussi variée que les caractères de ses personnages, Le Dernier Orc ravira pendant 750 pages les amateurs de vraies histoires, pas forcément si éloignées, comme le pensent beaucoup, des plus importantes de nos préoccupations.

 

Be safeBe safe
Xavier Laurent-petit
Ed. L'école des loisirs - Collection Medium - 10,50 €

Jérémy et Oscar, deux frères qui ne pensent qu’à la musique. Après une répétition, assoiffés, ils se retrouvent sur le parking d’un supermarché. Et c’est l’engrenage : Jérémy, l’ainé « croise » un sergent recruteur qui lui promet du travail, un métier, Jérémy construira des ponts. Et Jérémy signe et part pour l’armée. Oscar se retrouve seul. Seul, pas vraiment, car il y a Marka, la soeur de Jeff, qui lui aussi a signé. Marka, la perfectionniste dont Oscar est fou amoureux. Elle va remplacer Jeff à la guitare, et la vie continue, ponctuée par les lettres de Jérémy et ses permissions. Et là aussi c’est l’engrenage, il y a l’entraînement, il est heureux, il veut être le meilleur pour choisir son affectation. Il devient le meilleur, tireur d’élite.
Et il part, là-bas où la guerre fait rage.
Et il y a ses lettres pour la famille, lettres qui dédramatisent, mais il y a
aussi ses mails à Oscar, où il dit l’horreur.
Et il y a Jeff qui revient, blessé, amputé.
Et il y a Léon qui a déserté.
Et la vie continue.
Ce qui a changé : ce sont les chansons de Marka et Oscar, chansons nourries de ce qu’ils ressentent, de ce qu’ils vivent à travers les témoignages de Jérémy et de Jeff.
Be safe, n’est pas un roman sur la guerre d’Irak, mais sur les hommes que l’on envoie faire la « GUERRE » celle d’Irak ou celle du Viêt-Nam, ou celle d’Algérie chez nous. Sans scène d’horreur, Xavier-Laurent Petit réussit un superbe roman qui fait ressentir ce que vivent ceux qui sont impliqués dans ces conflits et comment ils sont amenés à prendre certaines décisions.

 

DOCUMENTAIRES

CostumesCostumes
Caroline Laffon (auteur)
Joëlle Jolivet (illustratrice)
Ed. Panama - 18,00 €

Joëlle Jolivet revient pour un album de taille remarquable : un imagier dédié aux costumes. L'album est construit à la manière des encyclopédies illustrées. A travers des regroupements par thèmes généraux (Sports, Armures, Métiers...) des silhouettes se retrouvent alignées dans des parures de différentes époques. On se promène ainsi librement à travers le temps, les pays lointains et modernes. Chaque représentation vestimentaire est nommée, datée et nous renvoie au pays auquel il appartient. Des rabats permettent également de découvrir plusieurs couches de vêtements et ainsi de déshabiller certaines silhouettes.
On découvrira à la fin de l'ouvrage des "petites histoires de costumes" racontées et commentées par Caroline Laffon. Ces histoires nous permettent d'en apprendre d'avantage sur l'évolution des us et coutumes en matière de vêtements. Cet ouvrage nous frappe d'emblée par sa taille et la beauté du graphisme. Chaque dessin est réalisé en linogravure et rehaussé de couleurs lumineuses à la gouache. Une petite particularité également, l'album existe avec deux couvertures différentes. Costumes est un album encyclopédique amusant et pédagogique qui s'offre également le luxe d'être un véritable album d'artiste !