Hommage à Jacqueline Gascuel

 


© Olivier Dion / Livres Hebdo

Passionnée et enthousiaste, Jacqueline Gascuel a été une figure majeure du monde des bibliothèques. Comme directrice de la bibliothèque publique d’application de Massy, elle a formé plusieurs générations de bibliothécaires au Centre de formation qui y était rattaché avant de prendre la direction de la bibliothèque centrale de prêt des Yvelines.

Militante convaincue de la cause de la lecture publique, Jacqueline Gascuel est de ces pionniers qui  ont contribué à sortir la France de son sous-développement en la matière. Elle a publié deux ouvrages de référence sur la construction et l’aménagement des bibliothèques et contribué à différentes publications et ouvrages collectifs.

De 1985 à 1989, elle a été la première présidente de l’Association des Bibliothécaires de France, à l’époque Association des Bibliothécaires Français,  véritablement issue de la lecture publique, puis rédactrice en chef de sa revue alors titrée Bulletin d’informations. Jacqueline Gascuel a marqué la profession par son militantisme et son engagement y compris en faveur d’associations humanitaires en Afrique.

Au nom de tous les collègues qui ont eu la chance de bénéficier de son enseignement, qui ont travaillé à son contact ou qui ont lu ses ouvrages, mais aussi au nom de tous ceux qui ont bénéficié de son action décisive en faveur du développement de la lecture publique, nous voudrions adresser nos plus sincères condoléances à la famille et aux proches.

 

Verbatim
Extrait de l’interview de Jacqueline Gascuel par Virginie Kremp, dans la revue Bibliothèque(s) n° 2, avril 2002, pages 25 à 28 :

Comment aimeriez-vous voir l’ABF évoluer ?
J’aimerais qu’elle ait plus d’audience dans les médias, qu’elle prenne position dans la vie politique et qu’elle aide à une reconnaissance de la profession. Les bâtiments qui ont été construits ont beaucoup aidé à cela, mais il faut encore valoriser nos compétences sur la promotion de la littérature, le livre et la culture, les outils du savoir et les technologies de l’information, en un mot, reconnaître les multiples facettes du métier de bibliothécaire. Elles ont été à l’origine du renouveau de l’image des bibliothèques publiques.

 

Et tous ceux qui l'ont connue, aimée, admirée...

Dominique Lahary
Jacqueline Gascuel est décédée le 8 novembre dans sa 93e année. Une cérémonie d'hommage aura lieu samedi 18 novembre (m'envoyer un message pour connaître l'heure et le lieu).
Je l'ai connue comme enseignante pour la préparation du CAFB en 1975-76. Une formidable enseignante comme le fut Annie Béthery, qui vous donnait à la fois les clés de compréhension et les raisons d'agir. Puis elle fut un acteur essentiel du développement de la lecture publique. Mais aussi une militante, présidente de l'ABF de 1985 à 1989 alors qu'elle dirigeait une BDP des Yvelines que des étourdis ont récemment fait disparaître. Puis assura la rédaction en chef de la revue de l'ABF. On lui doit aussi des ouvrages sur les bâtiments de bibliothèque.
Une bonne façon de façon de faire connaissance avec elle est de lire son interview dans le de la revue Bibliothèque(s) d'avril 2002
La dernière fois que je l'ai vue c'est pour préparer le numéro du Bibliothèque(s) célébrant le centenaire de l'ABF en 2006 auquel nous avons contribué l'un et l'autre.
J'ai replongé récemment dans mes cours du CAFB, comme hommage je joins la 1e page de mes notes sur son cours relatif aux statistiques.
Bravo et merci, chère Jacqueline !

Emmanuelle Liegey
Madame Gascuel nous a quittés, hélas !
"Elle était en 1987  la responsable du Centre de Formation ABF de Versailles quand j’ai suivi cette formation. Elle nous a transmis à toutes, bénévoles de petites bibliothèques (j’avais créé une bibliothèque dans une école élémentaire des Yvelines), sa foi dans des bibliothèques de proximité et nous encourageait par les cours qu’elle nous donnait avec ses collègues (Annie Bethery, Joëlle Hasselman, Françoise Hecquard parmi celles-ci) à persévérer dans notre rôle d’acteur de la lecture publique. Elle savait si bien nous motiver que nous fûmes plusieurs, bien sûr, ensuite, à passer notre CAFB. À la suite de cette formation, elle me recruta  à la BDY (J’y suis restée 20 ans). Elle a su me transmettre, même si elle était un chef d’établissement exigeant, cet allant et ce besoin de persévérer dans notre métier. Elle quitta la BDY, fin 1990, pour une retraite bien occupée. Je suivais tout ce qu’elle faisait et savait que, même, à 90 ans, elle n’hésitait pas à aller en Afrique pour la formation. Merci Madame Gascuel, je garde de vous une image positive. "

Bernard Mnich
Rendons hommage à cette grande figure de notre métier, qui aura marqué, par sa culture professionnelle, tant de bibliothécaires et tant de bibliothèques

Gabriel Lacroix
Oui, une grande dame énergique.

Sylvie Bonheur
Hommage à Jacqueline Gascuel, une des enseignantes qui m’a donné le goût de la lecture publique !

Françoise Pacha
Une grande dame de la lecture publique !

Jean-Francois Jacques
Nous devons énormément à Jacqueline Gascuel. Son ouverture d'esprit, sa bienveillance et son esprit d'entreprise ont admirablement complète et dynamisé son professionnalisme. Sa présence dans le numéro 2 du tout récent "Bibliotheque(s)", en 2002, montre bien comment elle avait à cœur d'encourager l'esprit de novation. J'ai entendu parler d'elle en premier lieu vers 1970 comme d'une professionnelle remarquable et ouverte par ma mère, qui terminait sa carrière de professeur de philo au lycée de Massy, et qui avait collaboré avec elle pour un travail avec les classes, et pour aider culturellement le foyer de réfugiés de la Cimade dont s'occupait mon père - elle dirigeait alors la Bibliotheque de Massy, liée à l'ENSB . Je l'ai rencontrée la pour la première fois en y passant le CAFB.... et bien souvent ensuite ! Ses écrits sur les espaces de la Bibliotheque m'ont beaucoup guidé. Merci Jacqueline, nous te saluons avec reconnaissance et amitié.
P.S. Le triste hasard veut que nous apprenions aussi ce soir le décès de Jacques Ralite. Chantre obstiné de l'éducation populaire, passionné et passionnant, communiste à l'esprit libre, les rencontres avec lui étaient toujours enrichissantes. Pas assez écouté, en raison d'une étiquette un peu aveuglante pour les esprits trop sectaires ?

Marie Paquet
Je l’ai connue en 1986 à Massy , une grande dame des bibliothèques.

Frédéric Lemaitre
Une référence du monde des bibliothèques

Ginette Pinochet
Rencontrée à Massy sa présidence énergique de l'ABF a marqué les esprits. Elle a formé toute une génération de bibliothécaires dans les années 70. Merci à elle.

Jean-Pierre Sakoun
Elle a préparé le renouveau de la lecture publique en France, au même titre que les Lecacheux, Ronsin, Baudin, à la génération desquels elle appartenait et que mirent ensuite en œuvre sur ces bases Jean Gattegno et son équipe. Dans notre univers professionnel discret, elle tient une place décisive, mélange si typique de réflexion théorique et d’action pratique à l’aune duquel on reconnaît les bons bibliothécaires.

Jean-Pierre Bouguier
Jacqueline Gascuel est au nombre de ces personnes qui ont marqué profondément les professionnels du livre. Ses ouvrages ont été pour moi des guides précieux dans l'exercice de ma profession. J'exprime ici toute ma gratitude.

Didier Guilbaud
Je me souviendrais toujours de Jacqueline Gascuel, la première présidente femme de l'ABF et qui venait de la Lecture Publique (Congrès d'Avignon), de sa voix qui portait et surtout de ce qu'elle nous a apporté à tous.

Elisabeth Degon
Oui, moi aussi je l'ai croisée à Massy, bibliothèque qu'elle dirigeait et où j'ai fait mon stage et fait de belles rencontres professionnelles. Une grande dame des bibliothèques qui a longtemps oeuvré pour la formation et des actions en Afrique, burkina ou Mali, je ne sais plus. Une femme engagée. Merci à ses exemples que nous avons eus alors !

Olivia de la Panneterie
C'est plutôt l'Afrique qui nous a liée toutes les deux même si, bien sûr, c'est à l'ABF que nous nous sommes rencontrées. Grâce à elle j'ai fait plusieurs missions au Togo, au Burkina et au Mali. Je l'en remercie encore aujourd'hui...Cela a déterminé une partie de ma vie personnelle...
Je l'ai beaucoup respectée, j'ai admiré son engagement. C'est grâce à des gens comme elle qu'on avance et qu'on se révèle. Merci Jacqueline, aujourd'hui je pense à vos enfants...

Viviane Ezratty
Effectivement une personnalité passionnée et engagée.

Josiane Machin
Moi aussi, je l'ai eu comme prof en 88-89.  J'ai toujours eu beaucoup de respect et d'admiration pour Jacqueline Gascuel qui se déplaçait aussi dans nos bibliothèques des Yvelines quelque soit leur taille.

Claudine Belayche
Jacqueline disparue …  toute une époque des bibliothèques publiques qu’elle a su représenter, animer, développer.
Quand en 1974 j’étais à l’ENSB (encore à Paris)  on avait le stage pratique lecture publique  à Massy, bibliothèque dite d’application où l’on allait voir  une autre façon de s’adresser aux lecteurs, de prendre en compte leurs demandes, de faire du développement de la lecture . Jacqueline avait cette qualité  de tenter  des expériences, d’aller voir ailleurs et  d’innover, d’adapter. D’ailleurs elle avait à Massy  installé -en lieu et place des traditionnels BROWN ou NEWARK - un affreux système « automatisé » d’enregistrement des prêts (je ne sais plus si c’était l’audio ou le vidéo, mais faire les courriers de rappel  avec ce système était une torture !)
Je me souviendrai toujours de Cécil Guitart, à l’époque  responsable de la discothèque de Massy, nous expliquer que pour les acquisitions, on n’allait pas dépouiller les critiques de  Diapason  (le must de la critique de la musique classique)  mais on écoutait sur Radio Luxembourg, la nuit, les NOCTURNES ( Bernard SCHU  et Georges Lang) l’émission devenue culte maintenant. On écoutait, avec les jeunes du comité de sélection et on allait dans la semaine acheter chez le disquaire …   Quel changement  par rapport à ce que nous apprenions dans les cours de bibliographie ! La prise en compte directe de la demande des usagers.
Jacqueline savait aller débusquer  les sujets  de journées d’étude passionnantes, l’une dont je me souviens au TEP (maintenant Théâtre de la colline) , sur les ouvrages scientifiques dans les bibliothèques … domaine sous représenté, pourquoi, comment y remédier ?
Nous avions à l’époque longuement discuté sur les liens Lecture publique – Théâtre, car   pour elle  (et beaucoup d’autres) la lecture de textes à haute voix avait toute sa place pour le développement de la lecture chez les publics peu lecteurs.
Elle était présidente lors du Congrès de l’IFLA  à Paris en 1989 ! quelle affaire ! Là aussi que d’échanges , de lieux à visiter, de bibliothèques à mobiliser ! Pour nous jeunes bibliothécaires français quelle occasion de rencontrer des gens de tous horizons, d’apprendre que en Inde par exemple,   la lecture pour les mal et non voyants était tellement facilitée, alors qu’en France on balbutiait sur ce sujet dans les BP !
Quand j’ai été élue à la  présidence de l’ABF, en 1994, nous avions décidé de  relancer une nouvelle édition « du Métier » , cet ouvrage de référence qu’elle avait créé  quelques années avant.   Elle m’avait bien expliqué, et elle y tenait : « le Métier ne fait pas partie de la Collection Bibliothèques » (qu’elle dirigeait aussi) . Elle avait négocié des conditions particulièrement favorables pour le versement des  droits auprès des éditions du Cercle de la librairie! Elle en était très fière !

Et tant d’autres choses… 

Françoise Danset
Jacqueline Gascuel vient de nous quitter sans bruit à l'âge de 93 ans.
J’avais fait sa connaissance  à l'ABF, alors que j’arrivais en région parisienne, au début des années 80, j'étais jeune bibliothécaire engagée déjà sur une certaine ligne de « militantisme professionnel » sur laquelle nous nous sommes très vite entendues. J'ai ainsi succédé à Jacqueline à la section des bibliothèques publiques, puis à la présidence de l'association en 1989, après la belle prestation de l'association au Congrès de l'IFLA tenu à Paris en août 1989.

Et ce fut un long compagnonnage de réunions animées, de débats parfois vifs dans des locaux qui sentaient le parquet ciré, rue de Richelieu, puis rue de Louvois, puis quittant le giron de la Bibliothèque Nationale, rue des Lions St Paul, et aujourd'hui rue de Chabrol. Locaux qui gardent le souvenir de sa forte voix, de son grand rire, de ses manifestations d'indignation voire de colère.

Jacqueline a été celle qui a su accompagner voire engager au sein d'une profession assez conservatrice, ce grand mouvement de reconnaissance et de promotion de la lecture publique dans les bibliothèques.

La lecture publique comme accès de tous au savoir et à la culture, alors que l'on sort avec peine de la confidentialité des lieux de savoir et d’une communication parcimonieuse des outils de la culture.

Ce sont les années du Ministère de Jacques Lang, les années de reconnaissance forte bien que tardive d'un  concept de service public déjà largement répandu dans le monde anglo-saxon, les années d'ouverture et de modernisation, de création de nombreuses bibliothèques dans les banlieues, les villes nouvelles, les villages.

L'ABF s'est alors engagée très largement dans ce mouvement de promotion des bibliothèques ouvertes à tous, en même temps que dans un mouvement de développement et de  défense d'un professionnalisme garant du rôle que les personnels étaient amenés à jouer dans ces nouveaux lieux d'accueil et de rencontre.

Et c'est dans le domaine de la formation professionnelle que Jacqueline Gascuel a certainement le plus influencé les pratiques de la lecture publique. En tant qu’auteur et directrice de la collection « Bibliothèques » au Cercle de la Librairie, elle a su à la fois théoriser et rendre directement utilisables tous les   éléments d'une mise en place concrète du concept : de la construction des bâtiments à leur aménagement, de la constitution des collections à l'accueil de tous les publics.

Elle a été aussi l'instigatrice et l'animatrice durant de nombreuses années  des publications de l'ABF.

Dans la bibliothèque de Massy, bibliothèque d'application de l'ENSB (Ecole Nationale supérieure des bibliothèques), lieu de formation du CAFB (Certificat d'aptitude aux fonctions de bibliothécaire), et bibliothèque pilote de lecture publique, qu'elle a dirigée pendant de nombreuses années, elle a aussi largement contribué à former et  à orienter de nombreuses carrières professionnelles.

Travailleuse acharnée, à la fois autoritaire et généreuse, cultivée et cultivant (son jardin de Verrières, dont nous avons tous gouté les fruits), Jacqueline  laisse à ceux et celles qui l'ont connue le  souvenir d'une personnalité forte et attachante, d'une grande professionnelle de la lecture et des bibliothèques,  riche aussi de son expérience de femme, de mère de famille, puis de grand-mère. Et c'était pour moi un autre élément de compagnonnage, pour lequel  les souvenirs abondent, comme cette recherche attentive des 15 cadeaux à rapporter à ses petits-enfants, du séjour en Chine lors d'un congrès de l'IFLA à Pékin.

Mais et surtout  Jacqueline Gascuel laisse  à tous les bibliothécaires plus jeunes un socle de connaissances et un corpus d'outils professionnels dont ils se nourrissent encore aujourd'hui.

Au moment où nous lui disons adieu, c'est de tout cela que nous lui restons redevables.